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former le cabinet, il se manifestera incontestablement un mouvement contre lui parmi les ouvriers anglais, qui supporteront beaucoup moins docilement qu’auparavant le joug des conservateurs, car outre que leur conscience de classe augmente, ils ont déjà le désir du pouvoir. Avec le gouvernement Mac Donald, la classe ouvrière anglaise, pour la première fois dans l’histoire, a eu, ou plutôt a cru avoir ses hommes au pouvoir. Pour elle, un gouvernement conservateur, c’est le danger de nouvelles guerres, la croissance du chômage, la politique d’aventures, l’offensive du capital contre le prolétariat. Curzon aura nécessairement une politique « ferme », mais ce sera pour lui un jeu dangereux : il n’arrivera qu’à révolutionner les ouvriers et à prouver la justesse du communisme.

Si Mac Donald revient au pouvoir, son gouvernement ne sera plus le même qu’auparavant. Personnellement, Mac Donald ne changera pas et tremblera encore davantage devant les capitalistes. Aujourd’hui, il fanfaronne, il clame qu’il fera sentir sa « volonté » à la bourgeoisie anglaise et invite les masses à une « lutte encore sans exemple ». Mais, revenu au pouvoir, il redeviendra le politicien petit-bourgeois que nous avons connu. « Nous avons été, dit-il, des hommes pratiques à notre naissance, nous le serons à notre mort et au moment de notre résurrection ». A mon avis, l’expression n’est pas tout à fait heureuse : comment peut-on être « pratique » à sa mort ? Quant au moment de leur « résurrection », lui et ses coadjuteurs, nous n’en doutons pas, seront « pratiques » : ils se mettront immédiatement à cirer les bottes de la bourgeoisie. Mais les ouvriers ne seront pas les mêmes qu’auparavant. Ils seront plus fermes, plus exigeants, car ils auront la preuve que, même sur l’arène politique, ils ont pu obtenir quelque chose, forcer leurs adversaires à accepter de nouveau un gouvernement ouvrier.

On ne saurait croire que l’Angleterre traverse à l’heure actuelle une crise politique au sens véritable du mot, que le sol tremble sous les pieds de la bourgeoisie. La bourgeoisie anglaise est expérimente, riche, forte encore sur le continent ; en outre, elle a de nombreuses colonies, où le mouvement révolutionnaire de libération nationale est encore faible. Néanmoins, elle subit une première secousse et, comme l’avait prédit Lénine au moment où il n’était pas encore question d’un gouvernement travailliste, les menchéviks anglais travaillent maintenant pour nous.

Notre parti frère anglais marche sous le mot d’ordre : A bas le gouvernement ouvrier royal ! Vive le véritable gouvernement ouvrier ! Ce mot d’ordre tombe sur un sol bien préparé : les prolétaires comprennent qu’il ne suffit pas de s’intituler gouvernement ouvrier pour être véritablement le représentant de leurs intérêts.

Le temps travaille pour nous

Un des principaux mots d’ordre du Labour Party sera vraisemblablement : Ratification intégrale du traité anglo-soviétiste. Il y a un peu plus d’un an, Curzon posait un ultimatum à l’U. R. S. S. qu’il menaçait des pires représailles si le bateau de pêche saisi dans les eaux russes ne lui était pas rendu et si on ne lui payait pas une forte indemnité pour l’emprisonnement de deux agents provocateurs britanniques. Maintenant, l’Angleterre traverse une grave crise politique et son parti gouvernemental exige la ratification intégrale du traité anglo-soviétiste. Comme on le voit, le temps travaille pour nous.