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un lancement, une force de production, je sais ce que c’est que de la publicité. Je sais en un mot ce que c’est qu’un organisme économique, industriel et commercial. J’ai appris aussi, je sais ce que c’est que l’amitié, cette puissance économique. J’ai connu d’une connaissance, d’une épreuve, d’une expérience unique, non interchangeable, ce que c’est que la fidélité, et l’infidélité au contraire, j’ai connu la constance et j’ai connu l’inconstance. J’ai beaucoup connu l’ingratitude. J’ai connu la camaraderie, cette pire de toutes les misères. Et comme j’avais appris la nourriture et le rendement d’une œuvre, j’ai appris aussi la nourriture d’un sentiment. Et le rendement. J’ai connu l’amitié ce qu’elle est, et ce qu’elle n’est pas. J’ai connu les amitiés et les inimitiés, les amours et les haines, le silence concerté, le boycottage, l’étranglement sourd, l’étranglement rauque, l’index laïque, l’investissement silencieux, la guerre économique, le blocus, déjà et de tout temps le siège.

Je ne nie point cette expérience, et qu’elle soit unique, et que ces quinze années et ce travail et cette vie m’aient apporté un enseignement unique, m’aient apporté, m’aient fait faire une expérience comme on n’en trouverait nulle part ailleurs. Nulle part une autre. Mais je sais aussi, je vois bien que de cette expérience j’en ai assez. J’en suis comme plein, comme débordant. J’en ai par dessus la tête. J’en suis saturé. J’en suis rassasié. J’en ai presque (beaucoup) plus qu’il ne m’en faut, s’il était permis de parler ainsi de l’expérience. Je sais aussi qu’il est temps de penser aux œuvres, ou tout au moins à la mise en œuvre, à un essai de commencement de mise en œuvre. Ce n’est pas tout que d’acquérir toujours. La vie est courte. Il vient