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XIX
un bon placement.


En moins de deux minutes la grande nouvelle s’était répandue. Les curieux arrivaient de tous les côtés. Beaucoup étaient si pressés, qu’ils n’avaient pas pris le temps de passer leur habit et ils l’endossaient en courant. Bientôt nous fûmes entourés d’une foule qui allait grossissant. Le bruit des pas ressemblait à celui d’un régiment en marche. Du monde à toutes les portes, à toutes les fenêtres. À chaque instant un visage se montrait au-dessus d’une palissade et une voix demandait :

— Ce sont eux ?

— Vous pouvez le parier ! répondait sans s’arrêter un de ceux qui suivaient les voyageurs.

Quand nous arrivâmes à la maison du défunt, il fallut jouer du coude pour y entrer. Les trois nièces avaient déjà été prévenues et elles se tenaient à la porte de la chambre mortuaire.

— Ah ! Marie-Jeanne, s’écria le vieux caméléopard, je t’aurais reconnue entre mille, rien qu’au portrait que mon pauvre Pierre a fait de toi dans ses lettres !

Il la reconnaissait tout bonnement à la couleur de ses cheveux, Marie-Jeanne en effet était rousse, ce qui ne l’empêchait pas d’être une très jolie fille. Ses yeux brillaient, son visage rayonnait, tant l’arrivée de ses oncles la rendait heureuse. Le roi ouvrit les bras et elle s’y jeta, tandis que le bec-de-lièvre tombait dans ceux du duc. Tout le monde se retenait pour ne pas pleurer, et les femmes ne se retinrent pas longtemps.

Enfin, comme par hasard, le roi donna un coup de coude au duc. Ils regardèrent autour d’eux et virent un cercueil posé sur des chaises,