ouvrage dans l’autre. De grosses larmes lui roulaient le long des joues et au bas on lisait : je ne te verrai plus, hélas !
Le second pastel représentait une dame qui contemplait un serin mort, et le troisième, une autre dame — c’était peut-être la même, je n’en suis pas sûr — qui levait en l’air une lettre cachetée de noir. C’étaient de très belles images ; seulement, cela me rendait triste de les regarder, surtout lorsque je songeais à ce pauvre Jim.
Si je possédais le talent d’Emmeline Grangerford, je ne me contenterais pas de ne dessiner que des pastels, où il y a toujours une femme qui pleure. Que voulez-vous ? c’était son genre et elle y réussissait trop bien pour en sortir. Elle travaillait à ce qu’on appelait son grand ouvrage lorsqu’elle tomba malade. Elle ne demandait qu’à vivre assez longtemps pour l’achever ; mais cette consolation lui fut refusée.
Figurez-vous une dame emmitouflée dans un long peignoir blanc, debout sur le garde-fou d’un pont, prête à sauter dans l’eau, avec les cheveux qui lui tombent sur les épaules. Par exemple, je ne sais pas pourquoi celle-là versait des larmes, car elle regardait une pleine lune qui ressemblait à une orange. Elle avait deux bras croisés sur la poitrine, deux bras étendus droit devant elle et deux bras levés au ciel. Ça lui donnait un peu l’air d’une araignée ; mais Georges m’expliqua que l’idée d’Emmeline était de laisser la paire de bras qui produirait le meilleur effet, et d’effacer les autres. Par malheur, le choix était si difficile qu’elle mourut avant d’avoir pris une résolution. Son dernier ouvrage resta donc accroché, tel quel, au chevet de son lit, et à l’anniversaire de sa naissance on l’entourait de fleurs.