La loge était ouverte. Assise devant sa table, Mme Diamant épluchait des oignons. M. Charibot lui jeta un regard de mépris, en soulevant courtoisement son chapeau. Et il eut l’impression, comme il en avait la volonté, de gagner directement l’escalier. Les forces ténébreuses l’emportèrent en lui sur les puissances de lumière. Il s’aperçut, sans pouvoir résister à son impulsion, qu’il avait incliné vers la loge, qu’il était maintenant debout entre les deux montants de la porte, que Mme Diamant, le couteau dans la main gauche, le considérait de bas en haut ; et il entendit sortir de sa gorge une voix étranglée qui murmurait :
— Je voudrais, madame… C’est au sujet d’un mot… un mot que vous avez dit ce matin… tandis que je sortais…
— Je ne saisis pas rapport à quoi vous venez me causer, répondit Mme Diamant, dont le cœur s’enfla de joie.
— Vous savez bien… bégaya Charibot. Vous avez dit… en parlant de quelqu’un… qu’il était… vous me comprenez ?… Je sais que ce n’est pas moi… Je suis tranquille… Mais tout de même, n’est-ce pas ?… Enfin, c’est… une curiosité… J’aurais voulu savoir de qui il s’agissait…
— Mon pauv’ monsieur !… fit la concierge avec une feinte sympathie. Je n’ai pas dit ça pour que vous l’entendiez. Non, bien sûr ! Alors, mettez que je n’aie rien dit !… Je ne veux pas me mêler de ce qui ne me regarde pas. Tout ce qu’on veut, mais pas ça !… Restez comme vous êtes, allez !… Ce qui nous a perdus, Diamant et moi, c’est d’avoir voulu savoir trop de choses. Les heureux, ce sont les sourds. Et les muets. Et les aveugles.
— J’aimerais mieux savoir… reprit M. Charibot en s’accrochant au cadre de la porte et en ravalant sa salive.
— Mon pauv’ monsieur ! répéta la femme. Si vous y tenez, bien sûr que c’est votre affaire. Qu’est-ce