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L’aventure bouleversa, comme il est naturel, les habitants de la maison des remparts ; les parents, fort inquiets, ne quittèrent plus pendant trois semaines le chevet de leur fille, car, assez régulièrement, chaque nuit, Mme du Launay, lorsque revenait l’heure où elle avait fait dans sa chambre la découverte du cercueil noir, était prise de faiblesse et de délire. Les Saint-Cast, qui désiraient ne pas ébruiter cette histoire, veillaient de près sur les paroles que prononçait alors Anne-Marie. C’est pour la même raison, sans doute, qu’ils ne voulurent mettre à ses côtés aucune étrangère pour la garder. Au matin, Hervé du Launay et le commandant de Saint-Cast furent visiter la maison du haut en bas, espérant trouver un indice qui les mettrait sur la piste des vilains qui avaient organisé la farce macabre : ils visitèrent les moindres coins de la maison « greniers et galetas, toits, cheminées, gouttières, citernes et soupiraux, sans oublier les mansardes et les immenses placards ». Ils ne découvrirent rien.

Pourtant les faits étaient là, et il faut en convenir, ces faits paraissaient actuellement encore extraordinaires. Des inconnus avaient pu pénétrer dans la maison des remparts, y introduire un lourd cercueil, l’installer tranquillement avec son appareil funèbre au centre d’une chambre, sans que personne se fût aperçu de rien, ni dans la maison, ni aux alentours. Comment donc les mystérieux porteurs et leur fardeau avaient-ils pu s’introduire dans l’appartement de Mlle de Saint-Cast sans être inquiétés ? Comment avaient-ils pu passer sous la grand’porte de la rue, monter un étage à l’intérieur, traverser trois pièces, pendant les allées et venues des domestiques, des ouvriers, des familiers du lieu, sans être remarqués ? Ces questions parurent insolubles. Quelque complice se serait-il caché dans la demeure du