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n’est pas ragoûtant de coucher dans cette caverne, avec la vieille d’Aiguillon, et le vieux lord, et le ménage Trêves, qui ne dort peut-être pas silencieux… Grâce charmante, il est bon quelquefois de n’avoir point de mari ! Moi, je dormirai tout à l’heure mieux que là-dedans : car je dormirai à la belle étoile…

Par le fait, les étoiles étaient belles, belles à miracle ! Le ciel nocturne, purifié par l’ouragan, éblouissait.

Cependant Mrs. Ashton souriait à Mme Francheville :

— Germaine, ma très chérie ! avez-vous cru, tout de bon, que la tyrannie de Mr. Ashton jamais me tyranniserait ?

Et, Mme Francheville demeurant coite, Mrs. Ashton insista :

— Germaine, adorable petite chose que vous êtes… avez-vous un instant supposé que, dans les dures circonstances où nous voilà, je subirais la loi stupidement jalouse et jalousement féroce de ce tout petit imbécile, mon mari ?

Elle respira très fort, puis, se répondant à soi-même, proclama : — Non !

Et Germaine Francheville, encore que vaguement déçue, ne se retint pas de considérer « sa toute jolie ».

La caverne s’ouvrait à quelques pas. Le seuil de sable fin s’étendait assez loin, tant en long qu’en large. Au-delà, le plateau ondulait jusqu’aux falaises de l’île. Et le Pic, à peine visible parmi la nuit, jetait partout son ombre immense, tel un manteau opaque sur la transparence tropicale.

— Donc, — constata gravement Germaine Francheville, — vous avez pris votre parti, et vous