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Myrrhine

Courtisane et martyre
roman inédit
par
Pierre Mille

…Ces petites flammes sulfureuses, courant sur la face de la mer, mauves, roses, parfois d’un bleu qui tournait au vert, elles étaient comme des fleurs, un immense parterre de fleurs, des violettes, des jacinthes, des roses : vivantes, et qui, dans l’ombre incendiée, se fussent déplacées pour rire et pour jouer sur les champs infinis de l’eau stérile. C’était une bien grande fête, merveilleuse ! Voilà ce que fit observer Myrrhine à son ami Théoctène. À ces fleurs il ne manquait que le parfum. Même l’odeur qui montait des vagues prenait à la gorge et suffoquait la poitrine. Pourtant Myrrhine n’éprouvait aucune peur. Est-il possible d’avoir peur des choses qui semblent faites pour le plaisir des yeux ?… Tous deux étaient assis sous les oliviers, qui à cet endroit descendaient presque jusqu’au bord de la falaise, et l’herbe était gonflée de cailloux aux angles rudes, que leurs pieds détachaient par jeu, pour les faire rouler, cent pieds plus bas, dans les invisibles flots du golfe d’Égine. Cependant, de minute en minute, de même qu’un forgeron frappant sur son fer assombri en fait jaillir des étincelles, plus loin, bien plus loin que ces langues de feu, une gerbe