Page:Les Œuvres spirituelles du Bienheureux Jean de la Croix, 1834, tome 1.djvu/198

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
194
La Montée du Mont-Carmel.

ne l’empêchaient nullement de sortir de sa maison.

En effet, rien de tout cela ne peut lui nuire, tandis qu’elle marche dans cette vive foi. De plus, Dieu cache l’ame ; il la couvre d’un voile ; il la préserve de toutes les embûches du démon, afin qu’elle marche sûrement dans l’obscurité. Elle est cachée au démon, parce que la foi, est pour le démon une obscurité si noire, qu’il n’y peut apercevoir l’ame. Aussi l’ame dit qu’elle est sortie avec sûreté et dans les ténèbres ; car, celui qui s’éloigne de l’idée des choses naturelles et des choses raisonnables et spirituelles, et qui suit l’obscurité de la foi comme le guide infaillible de son chemin, celui-là marche vers Dieu en assurance et sans danger. L’ame ajoute qu’elle a passé par cette nuit spirituelle, lorsque sa maison était paisible, c’est-à-dire, lorsque sa partie spirituelle et raisonnable goûtait une paix inaltérable. Les puissances et les forces naturelles de la même partie sont appaisées, les mouvemens aussi que les sens excitaient et faisaient passer jusqu’à la partie supérieure, sont calmés, lorsque l’ame est parvenue à l’union de Dieu.

Ainsi elle ne dit pas maintenant qu’elle est sortie fort agitée des inquiétudes de l’amour, comme elle le disait dans la première nuit du sens ; car les soins et les agitations de l’amour sensible étaient nécessaires pour renoncer à toutes les choses matérielles, pour entrer dans la nuit du sens, et pour