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Livre I. Chapitre I.

maison jouissait d’une profonde tranquillité, c’est-à-dire que la partie animale et les passions étaient mortifiées et endormies, et qu’elle ne faisait aucune opération envers elles. C’est ce qu’elle déclare lorsqu’elle dit que son sort est très-heureux d’être sortie sans avoir été aperçue, c’est-à-dire, sans que ses passions ni le désir d’aucune chose l’aient empêchée de sortir. Elle assure aussi que son bonheur est très-grand d’être sortie la nuit ; ce qui signifie que Dieu l’a délivrée de ses passions, et que c’est en cette délivrance que cette nuit consiste. Dieu lui a donc fait une grâce singulière en la mettant dans les ténèbres de cette nuit, puisque c’est de là que lui viennent une infinité de biens, et puisqu’elle ne savait pas le secret d’entrer en cette nuit, ne pouvant d’elle-même s’affranchir de la tyrannie de ses passions pour aller à l’union de Dieu. Voilà l’éclaircissement de ce cantique ; il faut donner maintenant l’explication de chaque vers.

CHAPITRE DEUXIÈME.
On enseigne ce que c’est que la nuit obscure par laquelle l’ame dit qu’elle a passé pour parvenir à l’union divine, et on en apporte les causes.
Enflammée d’un amour inquiet.


Le passage par où l’ame va à l’union divine est appelé nuit obscure pour trois rai-