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— Madame seulement... me répondit le serviteur, d’une voix discrète, endeuillée.

Il m’avait reconnu et se mettait au diapason du chagrin que je devais éprouver.

— Veuillez la prier de venir à l’appareil.

Quelques secondes d’attente, puis, indistinctement un mouvement de pas, un ordre bref à Louis : « Laissez-moi... » et enfin, les chères vibrations de l’aimée.

— Jô !... c’est vous, mon Jô !... ah ! par exemple. .. sans m’avertir !... N’importe ! je suis heureuse ! ... oui, dans notre malheur, il est bon de vous savoir là... Mais quelle affaire, mon ami !... Savez-vous quelque chose de Georgette ?

— Oui... tout... Venez vite, nous en causerons.

— J’arrive !

Le temps pour elle de sauter dans une voiture et elle était dans mes bras. Ah ! quels transports ! Quel délire, en dépit de sa conversation décousue, où elle me jetait pêle-mêle tous les événements récents, l’enlèvement de Georgette et de Robert, la plainte de son mari à la police, les recherches de la sûreté qui penchait pout un crime à la Landru, et son affolement à elle, sous la menace des reproches que je lui adresserais certainement d’avoir si mal gardé ma sœur. Je la rassurai :

— Mais non !... c’est insensé... Pourquoi tant d’histoires !... La vérité est tout autre...

— Ah ! tant mieux... tant mieux !

Je lui expliquai que Robert, inquiet de la passion que M. Variland témoignait à sa fiancée, l’avait tout simplement emmenée, comme c’était son droit. Son tort avait été de donner à ce départ physionomie d’esclandre ; mais ce n’était pas surprenant d’un homme dénué d’éducation. La lettre, que je venais de trouver en rentrant, les disait tous eux en train de voyager gaîment en Corse ; et ce qu’il y avait de certain, c’est que Georgette était