Page:Les Œuvres libres, numéro 7, 1922.djvu/281

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

quait à l’apaisement, à la tendresse, à la langueur, Le village, en bas de la côte, souriait de tous ses toits de tuiles fanées, de la frondaison de ses vergers. À notre droite les champs dévalaient vers d’harmonieuses collines déjà teintées du bleu qui annonce les voiles de la nuit. À notre gauche, après une mare endormie sous des nénuphars, la naissance d’un bois, mystérieux poème végétal...

— Je n’y arriverai pas seul... réclamait le chauffeur.

Tandis que M. Variland et Robert défaisaient leur veston, j’entraînai Rolande.

— Voyons, ma chérie, entamai-je en lui prenant le bras, tu me boudes depuis trois jours et tu as tort. Non, je n’arrive pas à m’expliquer. Il ne se peut que ton animosité provienne du manège de ces imbéciles avec moi. Dis, Georges mis à part, tu sais ce que sont les hommes ? des êtres frivoles, superficiels, légers, pour qui l’amour est une espèce de sport, et la femme un outil de vanité... Ne sommes-nous pas au-dessus de ces misérables exercices ? N’y a-t-il pas, dans notre liaison, assez d’éléments de tendresse pour que tu y satisfasses ton cœur, en attendant que Georges te rende à ton bonheur d’autrefois ?

— Reviendra-t-il jamais ?... céda-t-elle.

— Mais oui... tu le sais bien... il te l’écrit chaque fois. Ce n’est que patience à prendre... Mais, par pitié, en l’attendant, ne gâtons pas notre belle affection par de sottes rivalités de femmes !... Tu ne crois donc plus en moi ?... Veux-tu que je te rassure, en m’en allant ?

— Oh ! non... fit-elle, en me serrant plus étroitement le bras.

— Oh ! je sens que tu me reviens !... et j’en éprouve une joie infinie, car je t’aime, moi !...

Et faisant de ma voix une musique :

— Je t’aime, vois-tu, à un point que tu ne