Page:Les Œuvres libres, numéro 7, 1922.djvu/280

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Voyez donc...

Il rentra la tête :

— Une panne !... et nous sommes encore à trente kilomètres de la maison... et il est déjà dix-huit heures... Nous ne serons sûrement pas rentrés pour le dîner. Que vont-ils penser, là-bas ?

— Ils se douteront bien, rassura Robert, qu’on est dans la poisse, et ils nous enverront chercher...

— Avec quoi ?... la quarante est à Paris ; la grande limousine est inutilisable depuis hier...

— Il reste la torpédo de Robert, fis-je.

— J’ai défendu qu’on y touche, renseigna mon fiancé.

— Ah ! bien, nous voilà dans de beaux draps !... maugréa Rolande.

Et passant sa mauvaise humeur sur son époux :

Aussi, votre idée de partir à nous quatre seulement est absurde, mon ami ! J’en cherche encore la raison...

Et d’un ton qui signifiait : « Je la connais, la raison. Elle est Georgette, la raison. Vous avez manœuvré de façon que Chabrol et Riméral, vos rivaux auprès d’elle, ne nous accompagnassent pas... »

Elle me fustigea en même temps, une fois de plus depuis trois jours, d’une moue méprisante.

Fallait-il que sa sotte rancune la possédât ! Sous un ciel idéal, dans une tiédeur rarement offerte aux pauvres humains, avec la visite passionnante des vieux châteaux, la journée eût pu être une de celles qui comptent, Mais Rolande avait boudé tout le temps, épiant les façons de son mari avec moi. De son rêve sacré, de son Georges lointain, plus rien. Elle n’était plus que la jalouse d’une Georgette qui l’évinçait auprès de deux hommes qu’elle n’aimait pas, dont l’un l’horrifiait au point qu’elle se préparait à le lâcher. Voilà tout. O mentalité déroutante de la femme ! Boîte à surprises !

Et pourtant, ce soir encore, la nature convo-