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mes charmes avec une maestria de vieille courtisane. Je m’aperçus combien il est aisé pour une jolie femme de tourner la tête aux hommes. Il suffit d’une observation très rudimentaire de leur psychologie et de quelques témoignages placés à propos. Nos conquérantes sont vraiment inférieures, qui ne se pénètrent pas de cet art facile, se contentent d’une sorte d’empirisme d’amour, et s’en remettent aux faveurs du hasard ou à des impulsions momentanées. Si elles savaient leur puissance, le monde ne serait plus au sexe fort. Et j’en tirai pour mon propre compte des avertissements précieux, dans le cas, du reste improbable, où j’en reviendrais à mon état premier.

Le seigneur Variland s’en vint, dès le lendemain, se présenter à mes tendres lacets. Il y avait, il est vrai, déjà de lui-même à moitié engagé le col ; je n’aurais plus qu’à l’encourager pour que le nœud se serrât tout à fait. Certes, cette situation, par les entreprises et assiduités du bonhomme, m’allait devenir importune ; mais Rolande pourrait en tirer parti, qui sait ? et cela me décida.

J’inaugurais, ce jour-là, l’orangerie, mise à ma disposition pour travailler ; je la disposais en atelier, rangeant mes chevalets, mes toiles, quand il frappa à la porte. Je criai d’entrer, et il parut en un juvénile costume clair, suite logique de sa métamorphose.

— Figurez-vous, ma chère Georgette, déclara-t-il, que votre fiancé vient de m’écrire pour me demander d’être son témoin !... Voyons ? il faut que je sache définitivement...

Je le vis pâlir.

— Vous pensez sérieusement à vous marier ?

— Très sérieusement.

— Avec ce pilier de taverne ?... Vous l’aimez ?...

Comme je ne répondais pas, feignant de m’intéresser à un nettoyage de palette, il s’approcha