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Quand il se fut éloigné, ce fut à la baronne de me dire ses condoléances, avec des modulations dans la basse profonde, tristes, tristes...

— Ainsi donc, ma jolie, notre amie est souffrante et je n’étais pas là pour aider à la soigner !

— Qu’eussiez-vous fait d’autre, chère madame ?

— Appelez-moi Nirvâne... insista-t-elle, en me pressant la main. Ce que j’eusse fait ? Mais je ne sais pas, moi. J’aurais apporté mon cœur de femme. Les femmes ont toujours un cœur compatissant ; tandis que les hommes, ah ! parlons-en, des hommes !

Et, me pressant longuement la main :

— Il y a tant à faire pour les nôtres !... Vous m’y aiderez, ma jolie ?... Nous serons des amies ?

— Mais, certainement, chère madame.

— Appelez-moi Nirvâne...

Sa chemise molle répercutait des remous de gélatine. Son sourire évoquait les aspérités du roc épousé par les algues. Elle semblait, du reste, douée d’une double mâchoire... Ah ! non...

Les compliments de Rimeral me furent cependant plus intolérables encore. En lui, je sentais pour l’instant mon vrai rival. Ce bellâtre était, à n’en point douter, venu exclusivement pour Rolande. Las de solder le luxe de sa chanteuse, il espérait en celle que j’aimais une remplaçante gratuite. Et je ne pouvais oublier les encourageantes manières qu’elle avait avec lui.

Il m’aborda, après les autres :

— Ainsi, votre charmante amie est au lit... Que c’est contrariant !... Ce n’est pas grave, dites ?... Nous la verrons ce soir, je l’espère ?... Non ?.. Ah !... demain, alors ?

— N’y comptez pas, maître... déclarai-je, en me décidant à une tactique que la jalousie venait de me susciter. L’état de Rolande est beaucoup plus sérieux que ne se l’imagine M. Variland, qui ne l’a même pas encore été saluer. On fait venir