Page:Les Œuvres libres, numéro 7, 1922.djvu/253

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

effusions, de ses légèretés avec un Rimeral ; en dépit, peut-être même, qui sait, d’une faiblesse, le jour où l’appel de la tendresse serait par trop impérieux ; le jour où la nature, complice de la faute, pousserait à l’instinct ces pauvres nerfs las d’attendre...

— Je te le jure, Rolande,

Alors, sa gaîté reflamba, et nous n’eûmes plus qu’une occupation : réveiller M. Variland à chaque château que nous dépassions, pour nous le faire désigner, avec son style, et le nom de son propriétaire. Seul avec sa femme, le pauvre homme n’eût guère goûté cette curiosité... mais, pour moi, il s’extravasait les yeux du sommeil, regardait en clignotant, reconnaissait, citait le lieu, le style, le propriétaire, et se rendormait. J’éprouvais à ces malices une joie de petite fille ; mais c’était surtout parce que Rolande s’en régalait avec moi.

Nous traversâmes Tours et, vingt kilomètres plus loin, nous arrivions. M. Variland avait repris ses sens et recommençait à pérorer, comme hennit le cheval à l’approche de l’écurie. Il redressait sa taille, lissait ses cheveux, assurait son chapeau. Il tenait à entrer en beauté dans son domaine.

Très grande allure, ce château — quel style, M. Variland ? mais il ne répondait plus — une demeure du XVIIe dessinant, dès l’orée d’une importante avenue, sa façade, ses tours massives, dans le cadre d’un parc aux feuillages séculaires ; tandis que la pelouse, finement tapissée, s’évadait en pente douce vers une échappée de campagne profonde. Une eau vive caquetait sans répit sur du roc, vers un petit lac ou bateaux et périssoires étaient amarrés aux pilotis d’un chalet suisse, Derrière, les arceaux vitrés d’une vaste orangeries ; et, derrière encore, les communs, les écuries habitées, les remises à autos. Tout cela