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point que, pour combattre l’obscurité régnante, j’allongeai la main afin de saisir la poire d’électricité qui, d’ordinaire, se trouve à ma portée, sur la table de nuit voisine de ma couche. Mais ma main ne rencontra que du vide : il n’y avait pas de table de nuit. Je fus incapable de commenter cette disparition. Mes idées fonctionnaient imparfaitement, comme après ces longs repos bienfaisants où l’intellect a peine à se remettre en train. J’allais même me rendormir lorsque, soudain, une vive lumière naturelle, dispensée par une large baie vitrée dont quelqu’un venait d’écarter les opaques rideaux, m’imposa de reconnaître l’endroit où je me trouvais. C’était une pièce toute blanche, aux angles arrondis, tapissée de carreaux vernissés, où courait, à la jonction des murs et du plafond, une frise vert d’eau dessinant de petits amours à la poursuite les uns des autres. Comme meubles, rien. Rien, sauf un chariot roulant, chargé d’étagères en cristal, sur quoi se dressaient des bocaux remplis de liquides polychromes et plusieurs instruments nickelés, si bizarres en leur forme qu’il m’eût été impossible d’en définir l’utilisation.

J’avais assez souvent porté le réconfort de ma visite à de mes amis en cours d’une convalescence pour ne point douter que je me trouvais dans une clinique chirurgicale. Mais quelle était cette clinique et par quel événement m’y trouvais-je hospitalisé, cela dépassait pour l’instant mes facultés. Mon cerveau était encore tellement engourdi, que je ne pensai même pas à faire résulter ma situation nouvelle du sommeil profond, évidemment artificiel, dont j’avais été saisi sur le divan du professeur Tornada. Du reste, la présence d’une silhouette féminine à côté de mon lit me détournait encore de tout effort de rapprochement.

C’était, ma foi, une fort agréable infirmière, mise du costume de circonstance, avec cette diffé-