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ASIE

— Continue ! dit-elle.

Craignant de déchirer ces étoffes d’une fragilité extrême. Je m’efforçai de dégager les bras et je pestais en moi-même contre cette folle qui me faisait accomplir la plus sotte des besognes. Il est vrai de dire qu’en présence d’une femme c’était la seule dont je me sentisse capable maintenant.

Bientôt la chemise fut entre mes mains. Je vis deux seins aux mamelons fauves, très hauts situés, et robustes. Je me penchai sans me souvenir que ce geste déjà accompli ne m’avait pas porté chance, et je baisai les pointes.

La femme rit.

— Je te guettais. Si tu avais tardé à accomplir ce rite, je t’abandonnais au pal. Enlève ce qui reste.

Je défis précautionneusement la ceinture du pantalon et le baissai. Alors la femme, toujours son voile sur la bouche, me posa la main sur l’épaule

— Te voilà encore un homme.

Trois minutes après, sur le lit, elle me possédait avec une force et une décision qui me montrèrent la sagacité du « greffier », lorsqu’il m’avait affirmé l’ardeur de cette guerrière d’amour. Elle avait quitté l’espèce de casque pointu qui lui couvrait jusque-là la tête. De magnifiques tresses noires coulaient sur ses épaules. Elle avait aussi aboli le tchartchaf et j’avais vu un masque dur et maigre, légèrement maquillé et qui paraissait arriver de Paris. Les yeux fauves et ardents portaient des sourcils réunis par une raie noire. Je savais que dans le Turkestan cela signifie ardeur insatiable.

C’était la dernière épreuve. Ma mauvaise humeur était disparue, mon seul devoir était de tenter encore la fortune. Malgré ma fatigue, je luttai avec énergie et parvint, aidé d’une femme qui, elle, n’accueillait pas mes hommages en riant, ni avec mépris, à ne point sembler sans « inspiration » devant elle !

La fin de l’heure arriva sans que je m’en fusse aperçu. La cérémonie précédente se renouvela et sans