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ASIE

Je tire. Le coup sonne et se répand, dirait-on, sur l’étang.

La bête a fait une sorte de cabriole. Elle est allongée maintenant sur le sol. Je l’ai tuée.

Cette fois, il me faut suivre les errements de feu Robinson. Je dépèce ma victime et réunis des branches au fond du fossé qui m’a servi de lit.

J’ai fait cuire un morceau de gazelle. La vérité m’oblige à avouer la médiocrité du mets, surtout sans condiment…

Mais subitement, débordant d’énergie, je sors ma boussole de poche, puis je repère la direction de Khiva et me voilà parti.

J’ai marché tout l’après-midi. J’ai dormi sur un tertre près d’un autre étang, semblable à celui qui m’accueillit le matin. Le lendemain, emportant les derniers restes boucanés de ma gazelle, je continuai le chemin vers Khiva.

Je me couchai, la nuit venue, en un coin fait exprès, eût-on dit. C’était encore le reste de quelque vie disparue depuis des siècles. On eût dit trois murs d’une maison autour de laquelle le vent aurait accumulé le sable.

Heureux de cette demeure archaïque, je m’endormis tôt.

 

Je fus tiré de mon sommeil par des contacts violents autour de mes jambes et de mon torse. J’ouvris les yeux avant de comprendre.

— Serrez-le bien ! entendis-je en arabe.

Devant moi, une torche allumée éclairait plusieurs masques de Turcomans.

On me ficelait comme une andouille.

J’étais pris.