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ASIE

qui édifia des bibliothèques, fit fleurir des jardins et fructifier des écoles. Et cela se nommait Chahidjian : La reine du monde… Aujourd’hui ?…

 

Nous repartîmes le lendemain avant l’aube par une fraîcheur heureuse. Je songeais à tuer quelque gibier, pour varier notre alimentation, mais qu’attendre de vivant d’un pays aussi désolé ?

Mes plans m’avait indiqué, près de la zone que nous parcourions, une tribu dangereuse dont la proximité devait être évitée par le rapprochement de l’Amou-Daria. Je devais rencontrer aussi une petite ville, sise en une cuvette où poussait toute une flore heureuse. On y cultivait même le coton, que des Russes intelligents cherchent depuis longtemps à implanter en Boukharie.

Dans ce village, il me serait possible de trouver à acheter Quelques brebis grassement comestibles, pensais-je alors.

Nous avancions tout le jour avec tranquillité. Je recueillais de temps en temps des échantillons de minéraux qui me ravissaient, car un minéralogiste n’a pas besoin de monnayer ses trouvailles. Ce qui l’intéresse, c’est uniquement leur valeur documentaire.

Pourtant, je ne sais pourquoi, lorsque le soir vint, j’éprouvai une inquiétude, sans base et sans raison, mais irritante tout de même.

Je questionnai les plus intelligents de mes Afghans. Tous étaient d’une parfaite placidité. Ils ne me semblaient sensibles à rien de ce qui m’agaçait.

Nous fîmes des rondes à cheval autour du lieu choisi pour y camper. Rien ne se manifestait qui pût nous inquiéter.

La nuit fut emplie de soucis et de réveils hâtifs. Nous autres Européens sentions la nécessité de ne rien laisser au hasard et de surveiller les sentinelles vaguement somnolentes. Vingt fois je me ruai dehors, revolver au poing, croyant entendre je ne