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irritée d’Azélie, que j’ai peut-être précipitée dans l’éternité sans lui accorder le temps de prier et de se repentir.

La tendresse que j’avais pour ma mère me donna le courage de vivre et de lui cacher une partie de mes angoisses. Depuis mon malheur, sa santé avait été si fortement ébranlée qu’elle ne la recouvra jamais. Cette circonstance me retint dans un pays, où chaque lieu, chaque place me rappelait une douleur, et faisait pour moi de l’existence un continuel supplice.

Pendant mon procès, Ambrosio avait témoigné le plus vif intérêt à mon sort, et une grande douleur de la mort d’Azélie. Aidé de mes amis, il avait fait d’actives démarches, auprès des juges, pour obtenir ma mise en liberté. Lorsque tout fut terminé, il fut mis en possession de l’héritage de sa cousine qui lui revenait, puisqu’elle avait accepté la clause du testament d’Emmanuel Mendoce. Même dans le cas contraire, comme elle n’avait fait aucune disposition en ma faveur, Ambrosio devenait son seul héritier.

Je ne donnai jamais la plus légère pensée à cette fortune qui m’était devenue odieuse, et à laquelle, pour rien au monde, je n’aurais voulu toucher.

Lorsque je perdis ma mère, je fus sur le point de succomber à ma douleur. Ce fut alors que l’amitié de Maurice vint à mon secours. Ce fut ma première, ma seule consolation. Mais j’étais encore destiné au malheur de le perdre, comme si une fatalité se fût attachée à tout ce que j’aimais. Je reçus son dernier soupir, il me pria de rapporter à sa fiancée l’expression de ses regrets, son portrait et ses adieux. Je ne voulus pas mourir sans avoir rempli ce devoir sacré. Mon intention était de partir ensuite pour l’Australie, afin de finir ma triste vie loin du monde habité, et de tout ce qui me rappelle le passé. Je vous rencontrai, ma chère Rose, et un rayon du Ciel sembla descendre dans mon âme. Votre présence, le son