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gereusement blessé et on désespéra de ma vie. Livré à de cruelles angoisses, je me disais qu’Azélie allait recouvrer par ma mort le droit d’appartenir à un autre ; et je puisai dans cette pensée le courage de vivre.

Que nos vœux sont insensés ; je désirais ressaisir l’existence et j’eusse été bien heureux de mourir alors, car j’aurais échappé dans l’avenir à des souffrances qui devaient surpasser toutes celles du passé.

Pendant tout le temps que je fus en danger, Azélie me témoigna une excessive tendresse, et ne quitta pas un instant mon chevet. Je pus croire alors au retour de son affection, et je me persuadai que l’erreur d’un moment s’était effacée en présence d’un sentiment constant et indestructible.

Ma mère, au désespoir, avait partagé les soins d’Azélie, mais elle conservait au fond du cœur contre elle un secret ressentiment, l’accusant d’avoir causé par sa coquetterie le duel qui avait failli m’ôter la vie. Sa joie fut extrême lorsque le médecin déclara que j’étais hors de danger, et de son côté, Azélie ne parut pas moins heureuse de cette assurance.

Ce fut à sa tendresse que j’ai dû mon retour à la santé, mais depuis j’ai souvent maudit la vie qu’elle m’avait conservée. Je crus un instant que j’avais retrouvé le bonheur des premières années qui avaient suivi notre union. Nous fûmes passer le temps de ma convalescence dans une habitation que je possédais dans les environs de Cuba.

D’abord Azélie y parut heureuse, mais je m’aperçus bientôt de la contrainte qu’elle se faisait et de l’ennui qu’elle éprouvait dans cette solitude. Alors je lui proposai de revenir à la ville, où la vue de notre bonne intelligence devait imposer silence aux bruits désagréables causés par l’éclat retentissant de notre duel. Ce fut avec peine qu’Azélie y consentit, non-seulement elle me promit de