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LES
PETITS MOUTONS

Paris, 1843.
Air : J’ veux du bonheur à bon marché
(Louis Festeau).


Un jour, en lisant Lafontaine,
Je fus me promener aux champs,
Je m’arrêtai dans une plaine,
Où paissaient de beaux moutons blancs ;
Sitôt, ma main quitta mon livre,
Puis, en soupirant, je disais :
Tandis que l’homme essaie à vivre…
Gentils moutons, paissez en paix !

Nos orateurs à la tribune,
Grands parleurs, mais petits esprits,
Calculent plutôt leur fortune
Que les intérêts du pays ;
Moutons, que votre voix entonne
Ces doux bêlements que j’aimais,
Car ils ne flétrissent personne.
Gentils moutons, paissez en paix !

Lorsqu’une pauvre jeune fille
Se livre au penchant de son cœur,
Sans discernement sa famille
La laisse en proie au déshonneur ;
Quand un sentiment vous anime,
La nature a des droits plus vrais,
Pour vous l’amour n’est point un crime…
Gentils moutons, paissez en paix !