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américaine[1], nous donne d’autres détails qui mettent ce fait encore plus en lumière. En 1866, sur une population de 35 millions d’âmes, le nombre des personnes assujetties à l’Income tax, c’est-à-dire possédant un revenu de plus de 600 dollars en outre du loyer de leur maison et des sommes nécessaires pour les réparations et pour les taxes, n’était que de 460,170. L’année suivante, l’exemption de l’Income tax ayant été accordée aux revenus au-dessous de 1,000 dollars (5,000 francs), le nombre des personnes payant l’impôt ne fut plus que de 259,383. Dans cette même année, 50,088 personnes seulement payaient plus de 500 dollars (2,500 francs) à l’impôt sur le revenu la taxe étant de 10 p. 100 pour les revenus élevés, il n’y avait donc que 50,000 personnes possédant un revenu de 25,000 francs en papier déprécié, revenu que l’on peut considérer comme équivalent à un revenu de 15,000 francs en Europe[2].

On ne manquera pas de parler des fraudes. Les fraudes, nous les admettons mais alors même qu’on devrait doubler les chiffres qui précèdent et admettre que les 50,000 personnes dont il s’agit aux États-Unis en 1866 avaient un revenu, évalué en or, non pas de 15,000 francs au minimum, mais de 25,000 ou 30,000 francs, ce serait toujours sur l’ensemble de la population une proportion infiniment moindre que ne le pense le vulgaire.

Les petits pays ne diffèrent pas sur ce point des grands les cantons de la République helvétique nous en fournissent la preuve. Le petit État de Neufchâtel a publié dernièrement à ce sujet des statistiques curieuses. Il s’agissait d’un projet de transformation de l’impôt proportionnel existant sur les revenus et sur les capitaux en un impôt progressif. Le gouvernement du canton crut devoir, pour édifier le public, faire connaître le classement par catégories des contribuables à l’impôt proportionnel sur les capitaux et à l’impôt proportionnel sur les revenus. Voici quel était ce classement pour l’un et l’autre impôt en l’année 1874 :

  1. A curious chapter in politico-economic history, publié dans la collection des Cobden Club Essays, 1871-72, p. 497.
  2. Le passage relatif aux États-Unis est tiré de notre Traité de la science des finances, tome Ier, chapitre de l’Impôt progressif.