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ment en Angleterre, en France, dans les autres contrées civilisées ? A priori on est tenté de répondre affirmativement pour l’Angleterre on éprouve plus d’hésitation pour la France.

Le Royaume-Uni est un pays de grande propriété, de grande industrie, de commerce concentré et de gros traitements. On doit donc s'attendre à à y rencontrer plus d’inégalités dans la répartition des richesses que partout ailleurs. La race anglaise est prolifique et médiocrement économe. Se reposant sur la charité légale, ne redoutant pas pour ses vieux jours l’hôpital et le workhouse, l’ouvrier anglais fait moins d’épargnes que celui du continent. Ce serait exagérer, néanmoins, que de dire qu’il n’en fait pas, puisqu’il y a trois millions et demi de livrets et deux milliards de dépôts aux caisses d’épargne britanniques. Mais ces chiffres perdent de leur importance relative, quand on sait que la caisse d’épargne reçoit à peu près toutes les économies de la classe laborieuse et de la petite classe moyenne d’Angleterre, la propriété foncière, les fonds publics et la plupart des valeurs mobilières n’attirant pas, comme en France, les placements des petites gens.

Malheureusement nous ne possédons pas sur la distribution des revenus en Angleterre des données aussi positives que celles que nous offre sur le même phénomène l’Allemagne. Une étude faite en 1868 par M. Dudley Baxter sur les revenus dans le Royaume-Uni a été l’objet d’abord d’extraits et de commentaires sur le continent, de la part du Dr Soëtber en Allemagne et de M. le duc d’Ayen en France ; mais, soumis ensuite à une critique plus attentive, le travail de M. Dudley Baxter a paru tant à M. Nasse, professeur très compétent d’Allemagne, qu’à M. Soëtber lui-même, ne pas offrir une base suffisamment certaine et précise pour qu’on pût y rien édifier de solide. Nous sommes donc obligé de nous en tenir aux indications approximatives que nous offrent certains documents officiels, tels que Domesday book ou grand livre de la propriété territoriale, les statistiques de l’impôt sur le revenu, celles aussi de la taxe sur les domestiques mâles. Si incomplets que soient ces documents, le lecteur nous permettra d’en faire