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de cuivre y paraissent avec toutes les alternatives de hausse excessive et de baisse profonde que comporte ce genre de valeurs les mines d’or de la Gardette se vendent 1,150 puis 200 francs.

Nulle époque, croyons-nous, n’a été plus fertile en fondations extravagantes que l’année 1838. La cote de la Bourse de ce temps est un vaste nécrologe où l’on recueille un éclatant témoignage de la grandeur et de la chute des sociétés par actions. Quels qu’aient été les ravages des sociétés anonymes, ils ne semblent pas avoir dépassé ceux de la société en commandite. Et que dire du discernement du public de 1838 ! Notez qu’il avait plus d’instruction que le public de nos jours la foule des petites gens n’avait pas envahi la bourse ; les illettrés ne faisaient pas encore de placements c’était la haute et la moyenne bourgeoisie qui se livraient à cet agiotage effréné, à cette passion ridicule pour des industries sans avenir. Pendant qu’on accordait une prime de 100, de 200, de 500, de 1,000 p. 100 à toutes ces sociétés de bitume, d’asphalte, de stéarinerie, de savonnerie etc., les actions du chemin de fer de Paris à Orléans se cotaient à 407 francs, 420, 460 francs, les compagnies d’assurances jouissaient d’une prime qui était relativement modeste, qui montait à 200 p. 100 pour les assurances générales (lesquelles valent vingt fois plus aujourd’hui), mais qui ne s’élevait qu’à 20 p. 100 pour le Phénix, à 80 p. 100 pour la Nationale, à 24 p. 100 pour l’Union, à 10 p. 100 pour la France, à 2 p. 100 pour le Soleil, et qui n’existait même pas pour la Providence, toutes sociétés qui depuis lors ont quintuplé, décuplé l’avoir de ceux qui en ont recueilli les actions à cette époque.

Cet engouement pour des entreprises ridicules, cette indifférence ou ce dédain pour les entreprises sérieuses et fécondes, n’est-ce pas là un trait du caractère humain ? Il était, cependant, plus accentué alors qu’aujourd’hui. L’expérience n’a pas été, à ce point de vue, sans quelque profit pour la classe bourgeoise. On connaît les versicules sarcastiques