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LA SENTINE

gloires, quelles victoires les paieront jamais de tant d’ignominies ?

Ce fut à en vomir. Le candidat franchit pour la première fois des seuils, poussa des portes qui s’ouvrirent sur des « intérieurs » qu’il ne connaissait point, serra des mains qui ne se donnaient pas. Il estomaqua de son verbiage des familles entières et ahurit de sa grandiloquence de pauvres bougres. Il eut de la tenue, du maintien chez les gens chic et claqua la cuisse du plongeur chez le troquet. « Qu’est-ce que tu prends ? »

Et l’on prit. Il fallut boire, boire. On racolait. Ce furent des tournées où l’on parla de la gloire de la France. Après les troquets, les charbonniers. Chez l’un d’eux, qui se montrait récalcitrant, mon candidat, qui est né à Asnières, accusa une origine auvergnate.

Et il criait :

— Votez pour moi ! Votez pour moi ! Il vous faut un jeune homme actif et vigoureux. Me voici !

On promena l’activité du candidat jusqu’au fond d’une loge de pipelet influent. Le bonhomme nous reçut, bourru, et accepta cent sous pour nous donner des indications sur les opinions politiques des locataires. Une thune encore, et il promit de la propagande. On monta chez les locataires. On carillonna aux paillassons épais du premier étage et on frappa d’un poing familier la porte des mansardes.

Ceci encore ne fut rien. Le soir arriva. La réu-