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SUR MON CHEMIN

tionnelle du legs de l’artiste, c’est la réunion formidable, innombrable, antithétique, chaotique, et «une » cependant, de tous les éléments qui ont constitué son effort pendant plus de quarante ans.

L’amateur, le profane, l’élève viendront chercher là le secret, tout le secret de la pensée du maître, toutes les hésitations et toutes les certitudes de son art, toutes les étapes de son génie. Quel enseignement ! Quelles leçons ! Ils assisteront à la genèse de l’œuvre. Ils feuilleteront toutes les pages du rêve, depuis les dessins les plus vagues jusqu’aux formes les plus définitives ; ils sauront alors comment du modèle de chair et de santé qui a posé Salomé est sorti peu à peu l’être de prodigieuse volupté et de vice mystique qui tend vers la tête sanglante du Baptiste son geste d’extase, de plaisir et d’effroi. Ils jugeront le labeur infernal qui a abouti aux Messaline, aux Prétendants, aux Pasiphaé et aux filles de Thestius. Depuis la première esquisse jusqu’au coup de brosse que la mort arrêta, ils verront voguer les calmes Argonautes. Sous leurs yeux, naîtront les Muses, filles d’Apollon. Ils n’ignoreront point comment du Tyrtée boiteux et contrefait est sorti ce jeune dieu qui conduit en chantant Lacédémone à la victoire. Et surtout, ils sauront de quelles centaines de Lédas est fille cette Léda si simplement belle et si idéalement chaste. Devant l’oiseau divin qui pose si majestueusement son col recourbé sur