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AU « BOUL’ MICH’ »

du comité suprême. Puis on pouvait en être le président. Alors, oh ! alors ! le président de l’A !… C’était et c’est un personnage avec lequel compte cet autre président, celui de la République.

On avait déjà un avant-goût des joies qui accueillent tout bon citoyen chaque fois qu’il franchit un degré de plus de la hiérarchie sociale. Dans ces petites luttes pour ces petits honneurs, on se rendait compte des difficultés que l’on aurait à rencontrer plus tard, dans d’autres batailles, plus sérieuses, au bout desquelles sont des honneurs plus durables. On intriguait déjà. Mais on apprenait à aimer cette lutte, ces intrigues, ces honneurs. On était déjà férocement, platement, bassement ambitieux. On aspirait de toutes ses forces à être au-dessus des autres par la place que l’on devait occuper dans les assemblées et par le siège qui vous y était réservé.

Tous ces jeunes gens reçurent là une éducation inappréciable au point de vue spécial du régime actuel et de notre société telle qu’elle est constituée. Ils ont appris à en aimer le cadre et le mécanisme, et ils ont songé, dès leurs plus tendres études, à la place qu’ils occuperont dans ce cadre et au rouage qu’ils seront dans ce mécanisme.

Il ne faut point qu’on le leur change. Ils n’admettront pas qu’on le leur modifie. Ce n’est pas un mauvais esprit d’indépendance, de liberté, de progrès qui leur fera lâcher la proie pour l’ombre. Il savent ce qu’ils auront, et cela leur suffit. Ils