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LES TROIS

la République ; Déroulède affirme son rêve imprécis d’idéale justice et de liberté ! Pas un ne demande grâce pour le présent, pas un ne fait un geste pour éviter le coup qui se prépare pour venger le passé ; deux d’entre eux réclament qu’on les frappe au nom de l’avenir.

Quelle que soit l’erreur de ces hommes, on peut comprendre que quelques-uns aient marché derrière eux et qu’ils aient connu des dévouements. Ce sont des caractères. Le caractère de Déroulède avait fasciné des simples comme Barillier. Hier encore, quand on l’acquitta, il ne pouvait s’arracher de la poitrine de Déroulède, qu’il tenait étroitement embrassé. Ce départ fut sensationnel ; ivre d’enthousiasme, Barillier criait : « Vive la nation ! Vive la République du peuple ! Vive la République plébiscitaire !» et par-dessus tout ça, au-dessus de tout ça, effaçant tout ça, il hurlait : « Vive Déroulède toujours ! »

Tous les acquittés, du reste, avant d’abandonner définitivement la Haute Cour, à quelque Ligue qu’ils appartinssent, ont tenu à serrer les mains de l’ancien président de la Ligue des Patriotes. M. Godefroy, lui-même s’avança. M. Godefroy, lui aussi, avait jugé que M. Déroulède était un caractère ; mais il est probable que M. Déroulède n’avait point jugé que M. Godefroy en fût un, car il lui refusa la main.

M. Godefroy, en quittant ces bancs, oublia de crier : « Vive le Roy ! » qui est un cri séditieux, mais il poussa un « Vive la France ! » bien senti