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AVOCATS POLITIQUES

les tribunes, c’est un spectacle dont ils ne peuvent se débarrasser. Plus de cinquante avocats sont là, jouant de la manche et traînant leurs toges sous la surveillance paternelle du membre du conseil de l’Ordre, délégué par le bâtonnier pour présider à leurs ébats. On ne sait pas leurs noms ; on ne les saura jamais. Ils parlent, mais on n’en parle pas. On n’en parlera point. Quelle est cette foule ? D’où vient-elle ? Où plaida-t-elle ? Voici un grand procès et voilà d’innombrables petits avocats. Ne dirait-on pas qu’on a voulu remplacer la qualité absente par la quantité ? C’est une tradition que ces sortes de débats politiques mettent au jour de grands talents. L’histoire de ce siècle nous apprend que lorsque les pouvoirs publics poursuivirent des hommes pour leurs idées, d’autres hommes se levèrent qui s’illustrèrent en les défendant. Depuis quinze jours, il n’est sorti rien qu’un peu de bruit de ce groupe sombre ; nul éclair, nulle lueur n’est venue de tout ce noir. Le souffle sublime de l’éloquence n’a point agité cette toge immense qui s’étale, orgueilleuse, aux pieds du président.

Les occasions n’ont point manqué, cependant, des protestations superbes et des périodes fulgurantes. Il n’est venu à la tribune que des développements de conclusions et des bouts de conférence. Me Falateuf, accomplissant un devoir de président, a rappelé les gens à la sagesse au lieu de grandir le tumulte à la hauteur d’une proclamation foudroyante. Me Falateuf n’a plus pour