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SUR MON CHEMIN

large n’était point plus forte. Le président sans doute aura le même vent. Qu’il se console : si cette houle le poursuit jusqu’à Cronstadt, il ne débarquera pas plus pâle que le tsar dans le grand hall de l’Arsenal.

Pour le distraire de l’inévitable malaise, M. Félix Faure aura d’abord l’apparition lointaine des côtes de Suède, ce qui n’est pas toujours suffisant, puis la vision tant attendue d’Elseneur, qui peut être plus efficace sur un esprit qui goûte Shakespeare.

Pour peu que le président ait vu Mounet-Sully sur la « terrasse » du Théâtre-Français, il ne saurait rester indifférent au spectacle de cette autre terrasse qui vit l’ombre d’Hamlet le père. Ce sera moins impressionnant, mais c’est beau tout de même.

Helsingœr ! Ses hautes tours, ses créneaux, ses mâchicoulis surgissent soudain au ras des flots, à l’extrême pointe de la terre de Danemarck, qui fait une ligne sombre à l’horizon. Cela apparaît de très loin, et le palais semble immense. C’est la seule chose que l’on regarde sur la mer. Puissance de la poésie qui fait qu’on ne se détourne point, qu’on ignore le paysage d’à côté, la rive de Suède, très proche maintenant et jolie avec ses villages nombreux, ses toits rouges, ses maisonnettes basses, ses moulins à vent, dont les ailes tournent et qui semblent des jouets d’enfant…

« … Soyez les bienvenus dans Elseneur. » Nous