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ROULETABILLE CHEZ KRUPP

« Quand nous reprîmes notre route, nous avions épuisé nos provisions depuis six jours et nous étions mourants de faim. Malet surtout était à bout. Il me suppliait de l’abandonner. Je ne pus m’y résoudre, malgré tout ce qu’il pût me dire.

« Enfin, au moment même où, par une nuit noire, nous allions franchir la frontière hollandaise, des coups de feu retentirent derrière nous. Mon compagnon roula à mes pieds tandis que j’étais moi-même blessé au bras. « Sauve-toi ! me cria Malet, et souviens-toi ! » Ce furent ses dernières paroles.

« Je me suis sauvé, monsieur, et je me suis souvenu autant que possible !… J’ai souvent pensé aux conversations que j’avais eues avec Malet à propos des révélations de Fulber, et je crois vous avoir répété d’une façon assez précise les paroles qu’il avait entendues dans la bouche de l’inventeur !… »

Nourry avait terminé sa longue narration. Il avait été écouté dans le plus religieux et le plus anxieux silence.

Il s’était tu qu’on l’écoutait encore.

Soudain, une voix que l’on n’avait pas encore entendue s’éleva dans le coin le plus obscur.

« Pardon, monsieur, pourriez-vous me dire si les machines à coudre que l’on fabrique à Essen sont à point de chaînette à un fil ou à double point de chaînette à deux fils ? »

Nourry, assez étonné de la question, ainsi que tous ceux qui étaient là, du reste, répondit :

« Ils en font de tous genres, monsieur : machines à point de chaînette à un fil, machines à point de surjet, machines à point de navette à deux fils, machines à double point de chaînette à deux fils, machines pour chaussures, etc….

— Merci, monsieur, c’est tout ce que je désirais savoir…

— Vous n’avez pas d’autres questions à poser à M. Nourry ? demanda le directeur de la Sûreté qui ne