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CONSEIL DE CABINET SECRET

drez ce que l’on espère de vous, mon jeune ami ! En attendant…

— En attendant, je vais aller prendre un bain ! déclara Rouletabille, tout à fait enchanté de la couleur extraordinaire des événements.

— Allez prendre un bain et revenez-nous frais et dispos. Nous avons besoin de toutes vos forces, Rouletabille, de tout votre courage et de toute votre intelligence !… »

Le jeune homme était déjà sur le pas de la porte. Mais la voix de son chef avait pris tout à coup une valeur si singulière pour prononcer les dernières paroles, qu’il se retourna. Il vit le patron de plus en plus ému :

« Ah ! ça, mais, patron ! jamais je ne vous ai vu dans un état pareil !… Vous, ordinairement si calme. De quoi, mon Dieu ! peut-il bien s’agir !… »

Alors le directeur lui prit les deux mains, et, penché sur son reporter, le fixant dans les yeux :

« Il s’agit tout simplement de sauver Paris !… mon petit ami !… Vous entendez, Rouletabille !… Sauver Paris !… Et maintenant, à ce soir, 10 heures et demie !…


II

CONSEIL DE CABINET SECRET


Le reporter disparut dans un ascenseur, se sauva par un escalier de service. Il voulait être seul. Il avait besoin de réfléchir. Enfin, il contenait difficilement sa joie.

Depuis la guerre, il avait, comme tant d’autres, rempli obscurément son devoir, risqué cent fois sa vie dans une besogne anonyme de défense nationale qui était pleine de grandeur, certes ! mais qu’il eût voulue plus… disons le mot qui était au fond de sa pensée « plus amusante ».