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LE DERNIER VOYAGE DU « WESEL »

cibles aux audacieux évadés. Poursuivis par un remorqueur sur la dunette duquel on parvint à distinguer de nombreux officiers qui poussaient de véritables hurlements, Rouletabille et ses compagnons ne tardèrent pas à faire feu de toutes leurs armes. À ce remorqueur vinrent se joindre bientôt deux chaloupes automobiles.

Heureusement pour nos amis, un événement aussi extraordinaire que celui d’un cargo bravant les ordres officiels en pleine Allemagne, dans une contrée éloignée des hostilités, n’avait pas été prévu… On se trouvait désarmé devant tant d’audace… il y avait bien des canonnières sur la Ruhr, aucune n’était en état de poursuivre… Elles étaient revenues là pour réparations… Les embarcations qui donnèrent la chasse au Wesel n’étaient pas armées.

À l’abri derrière les bastingages et les sabords, Rouletabille, Fulbert et le Polonais firent de nombreuses victimes, tandis que La Candeur et Vladimir surveillaient, revolver en main, l’équipage prisonnier dans l’entrepont et les chauffeurs.

Au nord de Ruhrort, la poursuite fut même abandonnée par les Boches, mais Rouletabille pensa bien que ce n’était pas pour longtemps… Le téléphone avait dû marcher. On aurait du travail à la frontière… mais il fallait passer quand même.

Ils étaient décidés à tout ! à sauter ! à couler !… s’ils ne pouvaient passer !…

Les chaudières furent chauffées à blanc ! Le Wesel trépidait de toute sa membrure…

Et quand, à un kilomètre de la frontière, les bâtiments boches se présentèrent, lui barrèrent la route, il passa au travers, car il en coula un, reçut lui-même une volée de mitraille, dix obus, mais arriva en Hollande !… Il y arriva crevé, mourant, mais il y arriva !…

Un obus avait réduit en miettes le capitaine, son second et trois matelots.