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ROULETABILLE CHEZ KRUPP

trois Liégeois, parmi lesquels quelques femmes et enfants, de quitter Liège nuitamment, à bord d’un bateau réquisitionné par les Allemands, L’Atlas V, et d’aborder en Hollande.

Cet Atlas V est un remorqueur, ancien bateau de guerre, d’une certaine force, acheté jadis à une puissance neutre.

Il quitta Liège vers minuit, emporté par le violent courant de la Meuse, que les inondations ont fait déborder ; en cours de route, il rencontra bien des obstacles : un pont de bois près de Visé ; des câbles mis en travers du fleuve, mais il vint à bout de tout.

Le pilote avait blindé sa cabine à l’aide de tôles d’acier prises dans la soute à charbon. Grâce à cela, il put braver les nombreux coups de fusils des sentinelles allemandes et le feu des mitrailleuses. Des canons furent même braqués sur ce bateau, mais ils ne l’atteignirent pas.

Le voyage de Liège à Essden (Hollande) se fit en une heure trois quarts. Les voyageurs étaient couchés à fond de cale. Aucun ne fut atteint.

Ajoutons que ce bateau venait de coûter 3 500 francs de réparations aux Allemands.

Les choses se passèrent avec la même simplicité audacieuse, à bord du Wesel.

Au cours d’un déjeuner offert à l’État-Major, à une partie de l’équipage et à une cinquantaine de passagers exceptionnels, cinq démons armés jusqu’aux dents surgirent dans le moment que le champagne coulait à flots et avait déjà, sur quelques-uns, produit des effets somnifères tout à fait inattendus. L’État-Major fut fait prisonnier et enfermé à fond de cale. Le reste n’offrit aucune résistance. Le maître de chauffe et les mécaniciens durent obéir sous peine de mort aux ordres qui leur furent donnés, et le Wesel, sortant du Duisburg, eut bientôt atteint Ruhrort au confluent de la Ruhr et du Rhin. C’est là que les difficultés purent apparaître un moment invin-