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ROULETABILLE CHEZ KRUPP

On entendit au fond de la nuit, sa voix prudente qui appelait La Candeur et Fulber.

Le Polonais l’eut bientôt rejoint.

« Pourquoi ? Pourquoi donc n’appelles-tu pas Nicole ? »

Et Serge supplia : « Nicole ! Nicole ! »

Mais le silence seul répondit à ces appels désespérés…

« Elle est morte ! râla le Polonais… sans quoi elle eût déjà entendu ma voix ! Ah ! j’avais raison de ne pas vouloir me laisser enfermer dans cette caisse, sans elle !… Mail si elle est morte, je vous tuerai tous !… tous !… tous !…

— Vous ferez ce que vous voudrez ! souffla Rouletabille… moi, j’ai fait ce que j’ai pu !…

— Dis-moi donc que tu l’as sauvée, si tu ne veux pas mourir sur-le-champ… »

Et le Polonais, qui paraissait au bout de sa raison, accula Rouletabille dans un coin comme s’il voulait l’y réduire en miettes.

Rouletabille repoussa le mufle de l’homme qui lui envoyait son souffle de feu dans la figure… ce qui ne fit que redoubler la rage de l’autre…

« Ah ! grinça le Polonais dont les crocs agrippaient la cravate de Rouletabille… dis-moi donc qu’elle est sauvée… dis-moi cela… ou je te jure que tu as vécu ! »

Alors, le reporter, ayant secoué encore cette bête méchante, revint se glisser jusqu’au dessous de la lueur du falot et là, assis sur ses talons, le menton dans les mains, dit :

« Je te répète que j’ai fait tout ce que j’ai pu pour la sauver !

— Ce n’est pas… ce n’est pas… ce n’est pas ça que tu m’as promis !… Si tu tiens à ta peau, il faut me faire voir Nicole…

— Je ne tiens pas à ma peau ; mais tu verras Nicole…

— Ah !… gémit l’autre, exténué de rage impuissante