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ROULETABILLE CHEZ KRUPP

revenue, se laisse glisser jusqu’au sol. L’homme, après quelques gestes bizarres, redevient animal et, à quatre pattes, retourne à la fenêtre d’où il est parti, mais à reculons…

Arrivé à cette fenêtre, il rentre dans la maison de Richter, il se heurte à une autre ombre qui lui demande :

« As-tu encore besoin de mes souliers ? Bonsoir de bonsoir ! moi, je grelotte… et, pour notre affaire, s’agirait pas d’attraper un rhume de cerveau !

— Voilà tes godillots, pleure pas ! » répond Rouletabille en se débarrassant les mains des énormes chaussures dans lesquelles elles étaient entrées et qui lui avaient servi, sur la neige, à créer, de compagnie avec les siennes, une visible piste dans le dessein évident de faire croire an passage d’une petite troupe de fuyards par un chemin que les jeunes gens n’avaient certainement pas l’intention de suivre.

« Et le chef de magasinage ? demande à voix très basse Rouletabille, tout en travaillant avec un pic, dont il se sert comme d’une pince-monseigneur, à forcer tout doucement une porte, opération sans doute nécessaire pour faire croire à la fausse piste.

— Le chef de magasinage ? répète La Candeur tout en remettant ses souliers avec un gros sourire de satisfaction, bah ! ça n’est pas lui qui nous dénoncera !

— Tu as tué Lasker ?

— L’a bien fallu !… Il m’a trouvé en face des caisses et s’est trop intéressé à ma besogne… m’a posé des questions qui m’ont troublé… tellement troublé, mon vieux, que j’ai été obligé de m’y reprendre à trois fois pour qu’il ne me questionne plus jamais !… depuis le sergent de pompiers, j’ai le poignet foulé, tu sais !

— Et où as-tu mis le cadavre ?

— Justement !… je ne savais qu’en faire, moi !… L’inspiration, ça n’est pas mon fort !… Je l’ai caché en attendant sous un monceau de papillotes !…