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MYSTÈRE DE LA CHAMBRE JAUNE

sorte que le pays était à peu près inhabité. Quelques maisonnettes au bord de la route qui conduit à Corbeil, une auberge, l’auberge du « Donjon », qui offrait une passagère hospitalité aux rouliers ; c’était là à peu près tout ce qui rappelait la civilisation dans cet endroit délaissé qu’on ne s’attendait guère à rencontrer à quelques lieues de la capitale. Mais ce parfait délaissement avait été la raison déterminante du choix de M. Stangerson et de sa fille. M. Stangerson était déjà célèbre ; il revenait d’Amérique où ses travaux avaient eu un retentissement considérable. Le livre qu’il avait publié à Philadelphie sur la « Dissociation de la matière par les actions électriques » avait soulevé la protestation de tout le monde savant. M. Stangerson était Français, mais d’origine américaine. De très importantes affaires d’héritage l’avaient fixé pendant plusieurs années aux États-Unis. Il avait continué, là-bas, une œuvre commencée en France, et il était revenu en France l’y achever, après avoir réalisé une grosse fortune, tous ses procès s’étant heureusement terminés soit par des jugements qui lui donnaient gain de cause, soit par des transactions. Cette fortune fut la bienvenue. M. Stangerson, qui eût pu, s’il l’avait voulu, gagner des millions de dollars en exploitant ou en faisant exploiter deux ou trois de ses découvertes chimiques relatives à de nouveaux procédés de teinture, avait toujours répugné à faire servir à son intérêt propre le don merveilleux d’« inventer » qu’il avait