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MYSTÈRE DE LA CHAMBRE JAUNE

L’homme est là, assis au petit bureau de Mlle  Stangerson, et il écrit. Il me tourne le dos. Il a une bougie devant lui ; mais, comme il est penché sur la flamme de cette bougie, la lumière projette des ombres qui me le déforment. Je ne vois qu’un dos monstrueux, courbé.

Chose stupéfiante : Mlle  Stangerson n’est pas là ! son lit n’est pas défait. Où donc couche-t-elle, cette nuit ? Sans doute dans la chambre à côté, avec ses femmes. Hypothèse. Joie de trouver l’homme seul. Tranquillité d’esprit pour préparer le traquenard.

Mais qui est donc cet homme qui écrit là, sous mes yeux, installé à ce bureau comme s’il était chez lui ? S’il n’y avait point « les pas de l’assassin » sur le tapis de la galerie, s’il n’y avait pas eu la fenêtre ouverte, s’il n’y avait pas eu, sous cette fenêtre, l’échelle, je pourrais être amené à penser que cet homme a le droit d’être là et qu’il s’y trouve normalement à la suite de causes normales que je ne connais pas encore. Mais il ne fait point de doute que cet inconnu mystérieux est l’homme de la « Chambre Jaune », celui dont Mlle  Stangerson est obligée, sans le dénoncer, de subir les coups assassins ! Le prendre !

Si je saute dans la chambre en ce moment, « il » s’enfuit ou par l’antichambre ou par la porte à droite qui donne sur le boudoir. Par là, traversant le salon, il arrive à la galerie et je le perds. Or, je le tiens ; encore cinq minutes, et je le tiens, mieux que si je l’avais dans une cage… Qu’est-ce