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MAINTENANT IL VA FALLOIR…

cheminée. Nous nous en approchâmes et tendîmes nos mains à la chaleur du foyer, car, ce matin-là, on sentait déjà venir l’hiver. La pièce était assez grande ; deux épaisses tables de bois, quelques escabeaux, un comptoir, où s’alignaient des bouteilles de sirop et d’alcool, la garnissaient. Trois fenêtres donnaient sur la route. Un chromo-réclame, sur le mur, vantait, sous les traits d’une jeune Parisienne levant effrontément son verre, les vertus apéritives d’un nouveau vermouth. Sur la tablette de la haute cheminée, l’aubergiste avait disposé un grand nombre de pots et de cruches en grès et en faïence.

« Voilà une belle cheminée pour faire rôtir un poulet, dit Rouletabille.

– Nous n’avons point de poulet, fit l’hôte ; pas même un méchant lapin.

– Je sais, répliqua mon ami, d’une voix goguenarde qui me surprit, je sais que maintenant, il va falloir manger du saignant. »

J’avoue que je ne comprenais rien à la phrase de Rouletabille. Pourquoi disait-il à cet homme : « Maintenant, il va falloir manger du saignant… » ? Et pourquoi l’aubergiste, aussitôt qu’il eut entendu cette phrase, laissa-t-il échapper un juron qu’il étouffa aussitôt et se mit-il à notre disposition aussi docilement que M. Robert Darzac lui-même quand il eut entendu ces mots fatidiques : « Le presbytère n’a rien perdu de son charme, ni le jardin de son éclat… » ? Décidément mon ami