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dû reculer la cérémonie civile jusqu’au jour fixé pour la cérémonie religieuse, de telle sorte que le mariage à la mairie et à l’église devait avoir lieu ce même lundi.

Dès neuf heures du matin tout le quartier de l’Hôtel de Ville était envahi par une foule curieuse. L’événement du jour était moins le mariage que l’intervention de Hardigras annoncée urbi et orbi. On était venu des campagnes environnantes et l’on se pressait jusque sur les rampes du cours Mac-Mahon d’où l’on pouvait découvrir toute la rue de l’Hôtel-de-Ville.

La police d’État avait mis en œuvre tous ses services pour assurer la sécurité du cortège. Du reste, il n’y avait pas cent mètres à faire pour aller de la place du Palais où se trouvait le domicile de Supia jusqu’à la mairie. Ces cent mètres, les fiancés et la famille devaient les parcourir dans des autos de luxe. On se disait aussi à l’oreille que de nombreux policiers en civil étaient répandus dans toutes les rues avoisinantes. Enfin, MM. Souques et Ordinal, chacun dans une auto remplie d’hommes à eux, suivraient ou précéderaient les autos de la famille.

Que ne disait-on pas ? Les uns affirmaient que, malgré toutes les précautions, Hardigras saurait jouer aux Supia un dernier tour de sa façon. Certains, qui paraissaient les plus sages, émettaient avec timidité et prudence cette opinion que Hardigras, en intervenant dans cette affaire de famille, allait un peu loin et qu’il se mêlait, après tout, de ce qui ne le regardait pas. Mais tout le monde ne parlait pas ainsi.