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— Sans rien dire.

— Ah ! fit Grimm, rassuré… Et Lepage ? Est-il arrivé, Lepage ?

— Non, monsieur le directeur, non, M. Lepage n’est pas arrivé. Il n’est pas venu à son bureau ce matin…

— Et il n’a rien fait dire ?

— Rien !…

— Il est peut-être malade, fit remarquer Grimm.

— Je ne pense pas, répondit Lambert.

— Pourquoi ne le pensez-vous pas ?

— Parce que s’il était malade, il l’aurait fait dire.

— Alors ?…

— Alors, il est peut-être mort !…

Eustache Grimm, qui n’avait rien tant à redouter qu’un événement qui permît à un nouveau venu de mettre présentement le nez dans les écritures de Lepage, eut un sursaut.

— Taisez-vous ! Lambert, vous êtes stupide…

— Oui, monsieur le directeur.

Et il sortit.

Le lendemain, à la même heure, Lambert rentrait dans le bureau d’Eustache Grimm.

— Monsieur le directeur, faisait-il, c’est encore le domestique.

— Quel domestique ?…

— Le domestique du comte de Teramo-Girgenti.

— Qu’est-ce qu’il veut ?

— Il vient vous chercher pour déjeuner.

Eustache Grimm gronda, jura, bougonna, finit par faire répondre qu’il était encore souffrant.

Mais le surlendemain le domestique revint encore en disant que le comte attendait ce jour-là sans faute M. le directeur de l’Assistance publique pour déjeuner, car il avait les choses les plus importantes à lui dire, relativement à la disparition de l’un de ses employés, un nommé Lepage, et qu’à ce propos il était prêt à lui rendre le plus signalé service.

— Il faut y aller, monsieur le directeur, osa dire l’huissier Lambert, qui prenait souvent des libertés avec son maître. Si vous n’y allez pas, j’irai… Il faut avoir des nouvelles de ce pauvre Lepage, qui n’a pas reparu chez lui depuis quatre jours.

— Eh bien ! fit avec une résolution soudaine Eustache Grimm, viens avec moi ! Tu ne me quitteras que devant la porte du comte et tu ne t’en iras que lorsque je sortirai de chez lui… Comme tu dis, il faut que nous ayons des nouvelles de Lepage… Il n’ajouta pas : « Et puis, j’ai reçu un mot de Sinnamari qui m’ordonne de céder au désir du comte pour savoir ce qu’il me veut ! »

— Va chercher une voiture ! fit-il d’une grosse voix déterminée.