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— Son nom ?

— Je l’ignore. Mais je suis à peu près sûr que c’est la tête de fouine dont je vous ai parfois signalé la présence inquiétante au cabaret des Trois-Pintes.

— Par l’enfer ! hurla le roi. Patte-d’Oie !

Et il se précipita sur le tube acoustique qui le faisait communiquer avec le cocher. La voiture stoppa.

— Dites vite ! haleta R. C. Il n’y avait pas d’autre homme à côté de vous au moment de l’enlèvement ?

— Si, un homme qui m’a justement arrêté sur le trottoir au moment utile en me donnant le mot de passe.

— Ah ! fit R. C. en poussant un soupir comme si sa poitrine venait d’être instantanément soulagée d’un poids énorme. Il avait le mot de passe… Et comment était-il fait ?

— Je ne pourrais dire. Son chapeau me cachait sa figure et son manteau enveloppait complètement sa personne. Cependant, je jurerais bien que sa tête ne m’était point inconnue.

— Songez à quelqu’un que vous avez déjà vu ! ordonna le Roi.

— Un inconnu qui rôdait à la Mappemonde, le jour où Salomon retrouva la parole ?

— C’est lui ! s’écria le Professeur…

— Dixmer. Cela ne fait pas de doute ! L’affaire a été menée de main de maître par le Vautour et Patte-d’Oie ! C’est au Vautour qu’il faut aller.

Et il se rejeta sur le tube acoustique. La voiture reprit sa course avec une vitesse telle que le Professeur en fut effrayé, non pour lui, naturellement, mais pour ceux qu’elle pouvait écraser.

Et justement, comme elle tournait au coin de la rue de Rennes, elle fit un saut terrible et rebondit sur quelque chose de mou. On entendit des cris.

— Nous écrasons quelqu’un ! cria le Professeur qui voulait déjà ouvrir la portière.

Mais la main de R. C. lui saisit le poignet.

L’équipage n’avait même pas modifié son allure.

— C’est possible ! fit durement le roi. Nous n’avons pas une minute à perdre si nous voulons sauver Mlle Desjardies. Et vous le voulez, n’est-ce pas, mon ami ?

— L’orfèvre est épatant, gronda le Professeur.

— Maintenant, dit le roi, nous avons dix minutes devant nous. Vous pouvez nous conter votre petite histoire, Professeur.

Sa petite histoire !… Voilà comment ce jeune homme, habillé comme un prince de carnaval, qualifiait son aventure. Pour parler avec désinvolture, il fallait que Robert Pascal fût bien sûr de la retrouver, sa Gabrielle ! Au fond, ce sentiment ne pouvait être que réconfortant