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efforts pour reconquérir tout son sang-froid. Un instant, elle resta l’oreille attentive, écoutant les moindres bruits de l’hôtel.

Elle lui sourit et lui dit qu’il venait de se produire chez messire Thiébault une scène de la plus grande importance pour l’affaire qui les préoccupait. Elle savait l’étroite liaison qui existait entre le crime Lamblin et le crime Didier et toute l’importance qu’il y avait pour son père à ce que le premier crime fût puni, de telle sorte qu’on fût naturellement conduit au véritable auteur du second…

— Gabrielle, fit Robert, tout ce que vous venez de me raconter, je le sais… Je vous l’avais promis : vous tenez le premier maillon…

— L’assassin était là !… Vous aviez raison de dire que les preuves viendraient à nous, puisque l’assassin est venu !… La pauvre femme l’a reconnu tout de suite… « C’est lui ! s’est-elle écriée… c’est l’homme de l’escalier !… » Vous saviez donc qu’il allait venir ?

Robert ne répondit pas. Alors, Gabrielle reprit :

Mme Didier a été si émue par la vue de l’homme de l’escalier qu’on dut la transporter chez elle… Un individu, que vous connaissez certainement, Robert, pour l’avoir rencontré ici quelquefois, quand il habitait l’hôtel, la souleva dans ses bras et je les suivis tous deux. J’indiquai à cet individu la chambre de Mme Didier. Nous y entrâmes tous trois. Il y avait une faible lumière dans la chambre, je ne reconnus point tout d’abord l’homme qui déposa la pauvre femme sur son lit. Les enfants dormaient. Je me penchai sur Mme Didier et j’eus la satisfaction de constater qu’elle n’était point évanouie, mais par un phénomène dû à l’extrême fatigue et à l’extrême émotion, elle dormait, elle aussi, d’un sommeil presque régulier. Je la couvris avec soin, pour qu’elle n’attrapât point froid et je me disposais à venir vous rejoindre quand je me retrouvai en face de l’homme qui n’avait point quitté la chambre…

— Mais qui était cet homme ? demanda Robert Pascal.

— Je vous ai dit que je ne sais point son nom. Mais son regard m’effraie ! Un regard d’oiseau de proie qui ne vous quitte pas !

— Le Vautour ! murmura-t-il. Le Vautour !

Alors Robert Pascal fit signe à Gabrielle de ne point quitter sa place et, se levant, il entra dans sa chambre.

Là, il retrouva Cassecou, qui, patiemment, attendait des ordres.

— Eh bien, dit Cassecou, avez-vous réfléchi, maître ? Me livrez-vous le Vautour ?

— Non, Cassecou, non ! Moi vivant, on ne touchera point à un cheveu du Vautour !…

Il est probable que cette nuit-là Cassecou et Robert Pascal avaient encore quelques petites choses importantes à se dire, car ils ne se quittèrent point tout de suite, et ce n’est que vers onze heures et quart que l’ombre de Cassecou retraversa les terrains vagues qui s’étendaient derrière l’Hostellerie de la Mappemonde. Le sergent de R. C. revint