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— Non, mon vrai nom, Nichette, si cela peut te faire plaisir de le savoir, est Clotilde, expliqua Liliane d’une voix subitement grave.

— Clotilde, c’est un joli nom. Pourquoi cet imbécile vous appelle-t-il Cécily ?

XVII

DE DIFFÉRENTS ÉVÉNEMENTS QUI SE PASSÈRENT
CE SOIR-LÀ
DANS L’ATELIER DE ROBERT PASCAL

Le soir de cette journée où nous avons assisté tour à tour à l’émoi d’Eustache Grimm, de Régine et de Sinnamari lui-même, entre dix et onze heures, Robert Pascal travaillait encore dans son atelier de l’hôtel de la Mappemonde. Sous les rayons éclatants de sa lampe, il achevait de buriner l’argent d’une boîte à montre qu’il destinait au nielle ; il avait promis ce bijou à Marcelle Férand pour la récompenser de toute la grâce qu’elle mettait dans les soins dont elle entourait Mlle Desjardies, quand celle-ci se rencontrait avec elle dans l’atelier de Raoul Gosselin.

Robert Pascal semblait prendre à ce travail un plaisir extrême, moins peut-être à cause de la satisfaction d’artiste qu’il devait ressentir en terminant cette jolie chose, qu’à cause de la douce musique qui accompagnait son labeur tardif. Cette douce musique lui venait d’une voix adorée et révélait dans l’ombre la présence d’une jeune personne à qui Robert Pascal avait, depuis quelques semaines, abandonné son cœur.

Gabrielle Desjardies se plaignait délicieusement, mélodieusement pour les oreilles enchantées du pauvre orfèvre, de ne jamais voir celui-ci que la nuit, furtivement, quand tout semblait dormir au fond du « Conservatoire », car la chambre de Mlle Desjardies et l’atelier de Robert Pascal se trouvaient dans cette partie de l’hôtel de la Mappemonde.

Certes, elle aimait la parfaite tranquillité de ces rendez-vous où les jeunes gens échangeaient d’ardents mais encore chastes baisers, en attendant ce qu’ils appelaient tous deux le moment de leur délivrance, c’est-à-dire le moment où l’innocence de Desjardies apparaîtrait éclatante aux yeux de tous, et que seraient en même temps confondus ses ennemis. Mais, quand donc viendrait ce moment-là ?…

Gabrielle avait naturellement demandé des nouvelles de son père, qu’elle n’avait pas le droit de voir, pour leur sécurité à tous les deux, mais qui lui écrivait souvent pour relever son courage. Robert Pascal avait répondu que son ami R. C. avait trouvé ce jour-là à M. Desjar-