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— Ah ! lui dit-il. Où allez-vous donc chercher vos amis et les amis de vos amis, mon cher monsieur Dixmer ?

Dixmer était écrasé. Pourquoi avait-il voulu faire le malin avec Sinnamari ? Maintenant, il comprenait toute l’affaire : Lamblin, se rendant, le matin, au Palais où l’attendaient, pour la négociation définitive du chantage, le procureur et Régine, avait dû nécessairement garder sur lui les papiers les plus importants, les seuls qui comptaient aux yeux de Sinnamari, et dont l’employé du parquet pouvait espérer un bon prix.

Quels pouvaient être ces papiers-là ?… Des papiers qui parlaient d’argent ?… Oui… Ceux-là seuls valaient un crime… Qui demandaient de l’argent ? Non… Jamais Sinnamari n’eût été assez stupide pour écrire ou faire écrire ce genre de papiers-là… Qui en offraient, ou qui rappelaient des offres déjà à demi acceptées ?… Oui… évidemment… c’étaient les seuls que le procureur avait intérêt à conserver pour rester armé en face de certains gros personnages qui oublient facilement les services rendus…

Comment Lamblin s’était-il emparé de ces papiers ?… Le fait est qu’il les avait eus, puisqu’il avait voulu les vendre… et qu’il en était mort !…

Tout cela était clair, maintenant, dans l’esprit de Dixmer, mais ce qui l’était davantage encore, c’était l’inutilité des paperasses qu’il avait apportées.

Sinnamari regardait en silence Dixmer, qui s’était levé et se promenait, les mains derrière le dos, les épaules voûtées, le front soucieux, Dixmer vaincu, stupéfait, anéanti.

— De tout notre entretien, je ne veux retenir que ceci, fit bonassement Sinnamari, c’est que vous êtes venu pour me rendre service…

— C’est vrai, répondit Dixmer, un peu effrayé…

— Vous aviez des papiers que vous croyiez compromettants pour moi, vous me les avez apportés ; en somme, c’est très bien cela !…

— Je suis votre ami, monsieur le procureur, soupira Dixmer.

— Vous aviez appris, je ne sais comment, que M. Merlin était un agent de je ne sais quel escarpe qui se fait appeler le roi Mystère, et aussitôt vous avez pris la peine de venir m’avertir… Voilà qui est assez louable, mon cher monsieur Dixmer…

— Oh ! monsieur le procureur ! Je ne demande qu’à vous rendre service !

— J’en suis sûr… Le malheur pour vous est que le service est mince, attendu que les papiers ne sont pas compromettants du tout. Mais enfin, j’avoue que je serais un ingrat si je ne tenais pas compte de vos bonnes intentions à mon égard, mon cher monsieur Dixmer !