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— Non, monsieur Dixmer, non, il n’est pas seul. Il est avec M. Régine.

— Vous voyez donc bien qu’il reçoit, monsieur Cyprien…

— On ne saurait dire que M. le procureur impérial ait reçu ce matin M. Régine, car il est venu ici avec lui.

Dixmer regarda la figure du larbin, se demandant si celui-ci ne se payait pas sa tête ; mais M. Cyprien avait, plus que jamais, l’aspect doucereux, niais et ennuyé d’un domestique de bonne maison qui entend faire respecter sa consigne sans cependant se fâcher avec celui qu’elle gêne.

— Et M. le procureur est seul avec M. Régine ? demanda Dixmer.

— Non… il y a, avec ces messieurs, une dame…

— Et vous continuez à prétendre, monsieur Cyprien, que M. le procureur ne reçoit pas !…

— La consigne générale, monsieur Dixmer, comportait une exception…

— En faveur de cette dame ?

— Vous l’avez dit, monsieur Dixmer.

— Et pourrait-on savoir le nom de cette personne, que l’on reçoit quand on me laisse à la porte ?

— Mon Dieu, je n’y vois pas d’inconvénient ; c’est Mme Demouzin.

— Je m’en doutais… fit Dixmer entre ses dents… Et vous croyez qu’ils en ont encore pour longtemps ?…

— Je n’en sais rien ! Veuillez le croire, monsieur Dixmer…

— Elle vient souvent ici, Mme Demouzin ?

— Je l’ai oublié !…

— Voilà une réponse ridicule, monsieur Cyprien, car je ne vois pas pourquoi vous me cacheriez que Mme Demouzin vient quelquefois chez M. le procureur impérial… C’est une aimable vieille dame qui va voir tout le monde, et que tout le monde va voir. Mme Demouzin est une personne à la mode, dont le salon est fort coté par tous ceux qui ont l’ambition de devenir quelqu’un… ou d’obtenir quelque chose du gouvernement…

» C’est votre métier d’ouvrir les portes, monsieur Cyprien, ouvrez-moi donc celle de M. le procureur, je vous prie !

Mais le bon Cyprien répondit une fois de plus que c’était également son métier de les tenir fermées. Dixmer, énervé, alla aux fenêtres qui donnaient sur le boulevard du Palais.

— Tiens, fit-il, voilà l’équipage de M. le préfet de police qui rentre chez lui !…

Et il regarda sa montre, ne pouvant dissimuler un mouvement d’impatience.

— Avant une demi-heure, se dit-il, le préfet sera ici !… Cette histoire va faire un chambard !…