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explicables si, par hasard, mes soupçons devaient être confirmés !

À ces mots, moi-même qui avais cependant vu et touché l’Australie, je ne pus m’empêcher de frissonner en regardant presque avec apitoiement Robert Darzac, comme on regarde un pauvre homme sur le point de devenir la victime de quelque effroyable erreur judiciaire. Et tous les autres, autour de moi, frissonnèrent également pour lui, car les arguments de Rouletabille devenaient si terriblement possibles que chacun se demandait comment, après avoir si bien établi la possibilité de la culpabilité, il allait pouvoir conclure à l’innocence. Quant à Robert Darzac, après avoir montré la plus sombre agitation, il s’était à peu près calmé, écoutant le jeune homme, et il me sembla qu’il ouvrait ces yeux étonnants, extravagants, au regard affolé, mais très intéressé, qu’ont les accusés au banc d’assises quand ils entendent M. le procureur général prononcer un de ces admirables réquisitoires qui les convainquent eux-mêmes d’un crime que, quelquefois, ils n’ont pas commis ! La voix avec laquelle il parvint à prononcer les mots suivants n’était plus une voix de colère, mais de curieux effroi, la voix d’un homme qui se dit : « Mon Dieu ! à quel danger, sans le savoir, ai-je bien pu échapper ! »