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un grand bruit de ferrailles et de vitres dansantes. Je fis marché avec une voiture de place et moi aussi j’escaladai la vallée du Careï. Ah ! comme je regrettais déjà de n’avoir pas averti Rouletabille ! L’attitude bizarre de Brignolles lui eût donné des idées, des idées utiles, des idées raisonnables, tandis que moi je ne savais pas « raisonner », je ne savais que suivre ce Brignolles comme un chien suit son maître ou un policier son gibier, à la piste. Et encore, si je l’avais bien suivie, cette piste ! C’est dans le moment qu’il ne fallait pour rien au monde la perdre qu’elle m’échappa, dans le moment où je venais de faire une découverte formidable ! J’avais laissé la diligence prendre une certaine avance, précaution que j’estimais nécessaire, et j’arrivais moi-même à Castillon peut-être dix minutes après Brignolles. Castillon se trouve tout à fait au sommet de la route entre Menton et Sospel. Mon cocher me demanda la permission de laisser souffler un peu son cheval et de lui donner à boire. Je descendis de voiture et qu’est-ce que je vis à l’entrée d’un tunnel sous lequel il était nécessaire de passer pour atteindre le versant opposé de la montagne ? Brignolles et Frédéric Larsan !

Je restai planté sur mes pieds comme si, soudain, j’avais pris racine au sol ! Je n’eus pas un cri, pas un geste. J’étais, ma foi, fou-